Faisons un petit tour d’horizon sur l’origine des plantes que nous consommons pour leurs vertus de santé, en nous attachant particulièrement à la façon dont elles poussent plutôt qu’à leur origine géographique.
La culture de ces plantes est très récente, de l’ordre de quelques dizaines d’années ou de quelques siècles pour certaines et ne concerne qu’environ trois mille sur les plus de trente mille à soixante-dix mille utilisées couramment à des fins médicinales.
Je rappelle ici en passant que selon l’OMS, 88% des populations utilisent encore les plantes et les médecines traditionnelles en première intention, ce qui expose l’importance du sujet de la disponibilité de ces plantes médicinales pour l’humanité contemporaine en termes de besoins de santé à pourvoir immédiatement et en continu.
L’immense majorité d’entre elles sont collectées dans la nature, dans les biotopes spécifiques dans lesquels elles vivent. Depuis toujours, notre activité principale de chasseur cueilleur a impliqué d’aller chercher ce dont nous avons besoin là où il vit, jusqu’à ce qu’il n’y vive plus.
Ce sujet devient épineux pour des milliers d’espèces de plantes natives des zones peu étendues et qui sont néanmoins très demandées pour la simple raison de leur efficacité. La consommation globale de plantes médicinales est en croissance abrupte et constante (estimée à 230 Mds usd en 2023 et 430 Mds usd en 2032). En plus de l’utilisation traditionnelle locale qui a toujours eut lieu, le commerce international et l’augmentation récente de la population ainsi que le développement de l'attrait pour les plantes médicinales et les médecines naturelles ont pour effet de mettre une pression importante sur les stocks sauvages où sont encore majoritairement prélevées.
Certaines espèces sont adaptables en termes de biotopes et peuvent pousser dans des régions très différentes mais beaucoup d’autres sont très spécialisées et ont des besoins précis pour pérenniser leurs colonies.
La réduction ou la destruction de certains habitats parmi les moins étendus a un effet dévastateur sur la disponibilité et la survie de certaines espèces, notamment celles issues des régions tropicales montagneuses représentant une faible surface des zones tropicales ou celles de très haute altitude, à l’espace encore plus limité.
Ici au Maroc, la situation est la même qu’ailleurs, alors que les besoins de maintenir les écosystèmes naturels et de promouvoir les revenus des communautés rurales, l’augmentation de population et une récente série de mesures sociales louables ont engendré un développement rapide des unités de collection et de transformation de certaines plantes locales sans assez prêter attention aux besoins de développer les savoir-faire et la connaissance des plantes, aux conditions nécessaires pour amener à une bonne gestion des stocks et à la diversité de la flore.
La connaissance des plantes d’herboristerie s’est développée sur des dizaines de milliers d’années et les spécialistes des temps anciens ont passé des générations entières à vivre dans ces habitats, à observer la diversité locale, les affinités des plantes entres elles, tout en essayant et en consommant ces plantes avant de comprendre de manière certaine, dans quelles conditions, à quelle saison, qui et à quel âge selon les maux doit les consommer, quelle partie et quelle quantité de chacune peut apporter leurs bienfaits pour la santé.
Cette connaissance immense et fine des subtilités naturelles repose encore essentiellement sur les populations traditionnelles qui les cherchent et les collectent même si depuis ces temps reculés, les médecines traditionnelles se sont développées, produisant autant de lignées de spécialistes qui traitent les maux de leur communautés respectives et qui archivent le savoir accumulé pour le transmettre.
Et depuis peu, se sont développées de nouvelles lignées dont l’occupation est de collecter les informations et d’étudier de manière scientifique pourquoi et comment ces plantes ont été choisies il y a des milliers d’années.
Nous devons à ces ancêtres et à leurs descendants directs de pouvoir continuer ce travail important partout où ils vivent et travaillent avec ces plantes merveilleuses, pour les préserver là même où leurs énergies propres, leurs vertus, et leur patrimoine génétique se sont développés.
Les pratiques de répartition de graines, de bouturage, de récolte partielle, de préservation d’habitats, de revenus équitables, de libre accès aux terres porteuses, de transmission des savoirs doivent être encouragés à tout prix afin que les stocks perdurent, que la génétique continue son œuvre et que les écosystèmes conservent leur complexité.
Aussi, les plus petits paysans partout répartis, proche de là où ces plantes se trouvent naturellement mais aussi là où se trouvent des analogues climatiques sur les autres continents qui leur permettraient de s’installer et d’être cultivées par d’autres petits paysans, doivent être encouragés et récompensés dignement pour le travail de les propager et de les produire. Pourquoi les plus petits paysans ?
Car simplement ils s’insèrent dans l’habitat naturel avec plus de subtilité et moins de dérangement pour les écosystèmes encore riches de biodiversité que les grandes exploitations qui ont besoin de standardiser, de simplifier l’espace et d’infrastructures lourdes pour produire efficacement. Ces plus grandes exploitations peuvent se dédier aux plantes plus adaptables sur de grandes parcelles, moins écologiquement spécialisées ou bien là où la biodiversité est déjà fortement compromise.
Les solutions à ce grave problème de santé mondiale dû au potentiel de pénurie de certaines espèces (environ 3000 à 5000) sont maintenant en quantité insuffisante et certaines en voie de disparition, ne sont pas simples et impliquent d’adresser un large éventail de facteurs et de solutions comme ici entrevu.
Alors bien sur, au-delà de la disponibilité, se pose la question de la qualité. Est-ce qu’une plante sauvage est équivalente à une plante cultivée.
Les avis diffèrent parmi les herbalistes mais il est généralement admis, études à l’appui, que les herbes cultivées peuvent présenter un profil phyto-chimique notamment les oligo-éléments, acides aminés et les métabolites secondaires, équivalent voir supérieur à celui des herbes sauvages.
Ce n’est pas vrai de tous les constituants d’une plante dans toutes les analyses et dans toutes les conditions de culture, mais néanmoins, elles sont très comparables selon les quelques constituants que l’on peut analyser couramment. Mais, nous avons vu dans l’article « Extrait concentré versus totum » que ce n’est pas simplement une ou quelques molécules qui font l’intérêt d’une herbe médicinale et que la complexité de l’organisme entier dépasse de loin notre capacité à en analyser sa matière et au-delà même de sa matière.
Il s’agit plutôt de ce que l’on peut regrouper sous le terme d’énergie, d’un ensemble de qualités subtiles, pas encore ou peu analysable de manière précise et qui inclut les qualités inhérentes prêtées aux choses et organismes sauvages, de cette intention manifestée spontanément dans le concert de la création de l’écosystème ou chaque élément a trouvé sa place et a joué sa partition.
La beauté, la puissance et le pouvoir de fascination que les espaces naturels exercent sur nous sont peut-être des évidences de ces qualités subtiles. La question reste ouverte entre fantasme, perception de soi et réalité profonde. Difficile aussi de dire que mettre une graine en terre, de donner du soin à une plante, d’y donner temps et intention est forcément moindre que d’aller l’arracher d’où elle est apparue naturellement.
Après tout, il est courant que des plantes choisissent de ne pas pousser même en condition culture. Et ultimement, nous et notre intention sommes aussi éléments de l’écosystème et faisons partie du concert de la nature.
A Jouvence, nous avons le parti pris d’un milieu qui me semble le plus juste et le plus praticable : Assurer des conditions de survie et de croissance raisonnables à nos herbes, c’est-à-dire trouver des méthodes culturales qui leur conviennent, les arroser et les fertiliser le moins possible afin qu’elles sécrètent tout ce dont elles sont capables sous un stress relatif apparenté au stress des conditions naturelles, les récolter au meilleur stade de maturité et, les couvrir d’intention bénéfique et de prière pour qu’elle aillent aider, assister et soigner jusque dans votre tasse.
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